Versailles livre ses « Trésors des bibliothèques » tenus secrets
Plonger dans les couloirs du temps. L’invitation ne se refuse pas, dès qu’il s’agit d’explorer un haut lieu de prestige. Cerise sur la couronne : dans une ville royale ! Nous avons eu le privilège d’arpenter l’ancien hôtel des Affaires étrangères et de la Marine. Ce monument historique classé recèle plus de 55000 ouvrages aussi précieux qu’anciens. Ils sont la propriété de la bibliothèque de Versailles.
D’un bout à l’autre de ses murs, d’une hauteur vertigineuse, se dresse un fonds jalousement gardé, par un discret grillage, fermé à double tour. Ici, le livre ne se prête pas. On le contemple tel une relique. Le monde de l’édition n’a jamais été un long fleuve tranquille. Son histoire s’est écrite à l’encre de la controverse, du sang et des poursuites judiciaires. L’exposition intitulée « Trésors des bibliothèques de Versailles » nous l’enseigne. Elle révèle des pièces inédites dont il n’existe parfois qu’un exemplaire dans le monde ! C’est le cas de l’édition originale de Don Quichotte présentée sous verre.
L’exposition événementielle donne accès aux carnets et livres les plus sulfureux ayant fait grand bruit en leur temps. C’est le cas de Cymbalum Mundi, œuvre signée Bonaventure des Périers, un livre au destin maudit, dont l’auteur s’est suicidé. Livre sulfureux pour son temps, il ferait alors l’objet de destruction, sur ordre de François 1er. L’exemplaire exposé ici est celui retrouvé dans la bibliothèque de Louis XVI lors de son arrestation sous la Révolution française.
Un voyage à travers l’histoire des trésors à Versailles
L’exposition, d’une richesse patrimoniale insoupçonnée, nous guide pas à pas. Où ? Au cœur des arcanes de l’édition. Mais en préambule, il faut voir les œuvres les plus anciennes de la bibliothèque : une sélection de tablettes cunéiformes et de monnaies antiques. Puis la salle dite des Puissances d’Italie interroge sur la place de l’auteur. Toute aventure livresque commence ainsi: par l’auteur. D’auteurs, il est question au pluriel : les plus célèbres, comme les amateurs.
La deuxième salle s’ouvre sur une notion indissociable de la première : la provenance. C’est l’occasion de lever le voile sur les collections léguées par l’industriel Jean Lebaudy à la ville de Versailles. Il y est notamment question de carnets de Madame de Pompadour, de Montespan et du Barry… La salle de France présente uniquement des raretés éditoriales, du XVIe au XVIIIe siècle. Les salles suivantes sont dédiées à l’esthétique des œuvres et à la splendeur des arts graphiques.
Le parcours s’achève en apothéose : le faux et la provenance erronée ! Pour illustrer ces considérations, quoi de mieux que l’affaire des deux bagues jumelles à la Diane chasseresse. Arborant une agate sur or, l’une fut donnée par Clémenceau qui l’aurait portée le jour de la signature du Traité de Versailles de 1919. Pour découvrir le destin de l’autre anneau, rien ne vaut un détour par Versailles…Autant de mystères à percer, à la bibliothèque centrale, galerie des affaires étrangères.
Exposition « Trésors des bibliothèques de Versailles », à découvrir au 5, rue de l’Indépendance américaine – 78000 Versailles. Du 16 septembre au 16 décembre 2023. Entrée libre.
LUCILE GELEBART